Lena, Horst et la "flottille"

Publié le par Sébastien Martineau

Comment vous dire que j'ai été pris d'une grosse attaque de flemme? Bah comme ça : j'ai été pris d'une grosse attaque de flemme, et pas sûr que je sois tout à fait remis. Mais bon là il y a de l'actu, de la vraie, je ne pouvais pas me permettre de rester muet plus longtemps.

Commençons par Lena. Le phénomène Lena. Dites-moi pas que ça vous a échappé. Je vous en avais parlé rapidement ici et puis j'avais perdu le fil de mon compte à rebours pré-Eurovision. Ils devraient faire des calendriers de l'Avant pour ces choses-là (avec des pochettes miniatures de 45 tours de chansons kitsch dedans) qu'on s'y retrouve un peu.

J'avais perdu le fil donc et puis la semaine dernière, ce n'était tout simplement plus possible de passer à côté. C'est tout un pays qui espérait décrocher enfin la victoire à l'Eurovision. Lena, elle, elle s'en foutait un peu. Sa carrière est bien partie. Son premier album, écrit en collaboration avec son mentor Stefan Raab et baptisé "My Cassette Player", fait un carton. En plus, elle doit passer son Abitur en même temps et fêter ses 19 ans.

Mais bon, pas méchante fille, elle a quand même fait le déplacement à Oslo et puis, comme les bookmakers anglais l'avaient prédit, elle a gagné. Ce qui a inspiré à certains de mes - trop - jeunes voisins cette belle tirade, hurlée à leur fenêtre : "Deutschland hat gewoooooonen!" Et ça, c'était avant qu'ils ne décident de célébrer l'événement en chantant "Satellite", la chanson qui a fait gagné Lena, pendant deux bonnes heures.

Du coup, dès dimanche, tous les journaux faisaient leur Une sur la demoiselle, qui n'a été délogée de cette place qu'aujourd'hui... et par qui? Par Horst! Vous m'auriez demandé hier matin, je vous aurais dit : demain c'est sûr, c'est la "flottille" de Gaza qui fait les gros titres de tous les journaux. Mais ça, c'était sans compter sur la démission de Horst, le célébrissime président fédéral allemand. Horst Köhler.

J'ai découvert l'info hier sur Twitter, en italien et en revenant de déjeuner. Alors j'ai quand même vérifié et puis, non, vraiment, Horst avait démissionné. Il trouve qu'on manque de respect à sa fonction (enfin son ex-fonction du coup). Pour vous situer un peu l'action : les Allemands ne sont pas très chauds pour laisser leurs soldats en Afghanistan. Et là, Horst, dans une interview à la radio allemande, explique que c'est en partie par intérêt économique que la Bundeswehr est présente, militairement parlant, en Afghanistan.

Indignation. Au mon Dieu, nous aussi, les Allemands, nous serions aussi cyniques que ça? Faire la guerre pour de basses raisons économiques? Bouh ouh, bouh ouh!

Horst, encore ébranlé par la victoire de Lena (il a avoué avoir "vibré jusqu'au bout"), n'y tient plus et décide de démissionner, un an après avoir été réélu à ce poste qui... comment dire ça délicatement... est surtout prévu pour faire joli dans l'édifice institutionnel allemand.

Donc ce matin, en allant au boulot, je cherche désespérément des photos de bateau turc  à la Une des journaux, et je trouve Horst, avec sa femme, qui l'avait accompagné à la conférence de presse.

Bien sûr, l'attaque des soldats israéliens sur la "flottille" a été largement traitée par les journaux allemands. Le contraire serait surprenant. Et dans les médias français, elle a permis de mettre à l'honneur le mot "flottille", peu usité, et bien pratique lorsqu'on ne sait pas s'il faut parler de "convoi humanitaire" ou d' "expédition d'activistes pro-Palestiniens". On peut alors s'abriter tranquillement derrière "flottille à destination de Gaza".

Ce serait pratique s'il y avait un mot passe-partout pour qualifier la politique d'Israël aussi, mais ça risquerait d'être vulgaire, pour s'adapter au sujet...

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